J2 - Guess who's back (Callum & Amelia)

Amelia leva la tête, cherchant à apercevoir le ciel mais renonça aussitôt. Impossible de voir quoique ce soit tant les branchages étaient touffus en hauteur. Impossible donc de savoir depuis combien de temps elle errait dans cette maudite forêt. Une éternité, semblait-il. Impossible aussi de se repérer correctement, si bien qu'elle n'était pas sure de pouvoir ratisser entièrement cette zone, même si elle le voulait. Le seul avantage, semblait-il, était la vue dégagée que les troncs maigres offraient aux alentours. Elle aurait pu repérer un tribut ennemi à des dizaines de mètres à la ronde (l'inverse était malheureusement également vrai). Si la jeune femme cherchait bien quelqu'un, ce n'était nullement pour verser un peu plus de sang. Elle en avait assez vu, aujourd'hui. Non, ce qui l'avait menée dans cette forêt trop glauque à son goût, c'était l'espoir d'y retrouver Callum ; Aurelianne lui avait dit l'avoir vu, à l'Est. A l'Est elle était donc allée et, à présent, elle commençait à douter qu'il y soit. Ou qu'il y ait jamais été. Ne fais confiance à personne, souffla une voix au fond de sa tête. Oui. C'était les Jeux. Elle était seule, il fallait qu'elle s'en souvienne.

Soudain, quelque chose bougea à quelques mètres de son épaule droite. La tribut tourna immédiatement la tête, couteau à la main mais ne vit rien. Après avoir cherché un peu, elle arriva à la conclusion que la nervosité et la fatigue la gagnaient et qu'elle commençait à imaginer des choses. Pourtant, la silhouette qu'elle aperçut une dizaine de minutes plus tard, à une cinquantaine de mètres d'elle, fut bien réelle. Et elle la reconnut aussitôt.

"Callum !" cria-t-elle à son adresse, avant de courir vers lui, oubliant sa prudence et la coupure de sa cuisse qu'elle avait peiné à faire arrêter de saigner. Lorsqu'elle arriva à sa hauteur, le soulagement de l'avoir enfin retrouver s'effaça aussitôt pour ne laisser place qu'à une rage bouillante. Amelia le plaqua alors contre le tronc de l'arbre juste derrière lui, l'avant-bras lui maintenant le cou. Puis elle dégaina son couteau, le posa sur sa gorge avant de lancer avec colère : "Donne-moi une raison, une seule, de pas le faire !" Il était parti. Il l'avait laissée seule au milieu des loups. Il aurait pu mourir tout seul, et elle avec. Gambader en solitaire dans cette arène, c'était du suicide pur et simple alors : "Et dis pas que j'mourrai ensuite. J'm'en fiche, parce que si t'es si déterminé à nous tuer, autant en finir tout de suite..." souffla-t-elle en appuyant un peu plus la lame contre sa peau.

Tout ce qu'il avait cherché à faire, c'était fuir le son de ces maudits piafs.
Aurelianne repartie, Andrew et Tempest aussi, il n'avait pas attendu et s'était mis à courir en se bouchant les oreilles. Il avait couru et ne s'était pas arrêté pendant plusieurs minutes, peut-être même plusieurs heures, il n'en avait vraiment aucune idée. Tout ce qu'il voulait, c'était quitter cette partie de l'arène et ne plus jamais y retourner. Le chant de ces oiseaux était sérieusement le son le plus agaçant qu'il ait entendu (-et pourtant, il était en binôme avec Amelia-). Au début doux et agréable, il avait peu à peu, commencé à devenir de plus en plus insupportable, et sonnait désormais comme le bruit d'une craie neuve sur un tableau d'école. Un son grinçant qui vous fait dresser les poils et vous donne envie de pleurer. S'il était resté dans cette forêt une minute de plus, aucun doute qu'il serait devenu fou, et aurait probablement fini par se fracasser le crâne contre un tronc d'arbre, se tuer simplement pour que ce bruit infect cesse. Oui, c'était insupportable à ce point.
Il ne savait pas exactement où il se trouvait, mais le chant des oiseaux était devenu un chuchotement lointain. Quand il retira les mains de ses oreilles et qu'il s'en rendit compte, il prit le temps de se laisser tomber sur le sol et de verser quelques larmes de soulagement. Il resta par terre de longues minutes, avant de finalement décider à se relever.
Il but une gorgée d'eau -il tentait d'économiser- et se remit en route sans plus tarder. Il ne voulait pas prendre le risque que ces maudits piafs se rapprochent de sa position.
Il devait partir. Partir loin d'ici.

La corne était sa première destination. Y retourner discrètement et récupérer Amélia. Il y avait réfléchi, et sa décision de quitter la corne avait été tout simplement stupide. Il ne voulait pas qu'il arrive quoi que ce soit à la jeune femme, car lui aussi risquait sa vie. Et il ne faisait aucun doute que la concernée pensait la même chose de son côté.
Peu important l'accueil que lui réserverait les carrières, il tâcherait d'être discret.

Alors qu'il marchait tranquillement, les yeux fermés, le front trempé de sueur, et visiblement épuisé. Il entendit une voix. Une voix plus agréable que le chant des oiseaux, mais qu'il aurait tout de même préféré ne pas entendre. « Callum ! » Amélia.
Il avait, certes, envie de la retrouver, mais il aurait préféré qu'il la retrouve muette. Pourtant, aussi agaçant était-elle, il était soulagé de la revoir, et en bonne santé.
Il releva le regard et la regarda s'approcher, furieuse. Il fut capable de lui adresser un petit sourire qui, hélas, s'effaça rapidement alors qu'elle le prit par la cou et le plaqua contre un arbre.
Callum fronça les sourcils, et écarquilla les yeux quand sa binôme posa son couteau sur sa gorge. « Donne-moi une raison, une seule, de pas le faire ! » Il fronça les sourcils, c'était plutôt évident. « Et dis pas que j'mourrai ensuite. J'm'en fiche, parce que si t'es si déterminé à nous tuer, autant en finir tout de suite... » Il soupira. Inutile de faire le malin sur ce coup là, c'était le fautif. Il avait été un imbécile, et était forcé de le reconnaître. Il n'avait vraiment pas d'excuses.
D'un geste délicat, il posa sa main sur le bras de sa binôme et l'abaissa. Une fois la menace de son couteau sous sa gorge écartée, Callum s'excusa du regard. « Amélia, je suis vraiment désolé. » Sa voix tremblait d'épuisement. « C'était stupide de ma part, je le reconnais. » Mais le mal était fait, et heureusement, ils s'étaient retrouvés. Ils ne s'en sortaient pas si mal. « Je t'en prie, partons vite d'ici … les oiseaux ... » Il soupira lourdement en faisant un pas en avant.

Menacer son propre binôme, pire, considérer sérieusement pendant même une seconde la possibilité de vraiment lui ouvrir la gorge : voilà une tactique bien stupide. Mais Amelia avait les nerfs à fleur de peau, et revoir Callum, penser à nouveau à sa fuite imbécile dans la nuit, au fait qu'elle aurait pu mourir ce matin en partant à sa recherche, tout cela l'avait fait exploser. Au fond, il pouvait s'estimer heureux d'avoir été simplement plaqué contre un arbre - elle aurait été capable de bien pire, si une voix raisonnable dans son esprit ne s'efforçait de lui rappeler qu'ils étaient dans la même équipe. Un détail que Callum, pourtant, semblait avoir oublié en l'abandonnant avec les autres Carrières. Plus que tout, la jeune femme voulait lui faire payer son erreur, évacuer toute la rancœur qu'elle ressentait à son égard, elle aurait adoré qu'il réplique sur le même ton qu'elle, lui donnant ainsi la parfaite excuse pour s'enflammer. Il n'en fit cependant rien et la délicatesse avec laquelle il posa sa main sur son bras pour écarter la lame de son cou surprit suffisamment Amelia pour qu'elle le laisse faire.

Aussitôt, elle regretta de s'être emportée de la sorte. Elle pensa à sa famille, rassemblée, toute leur attention tournée vers l'écran, vers elle. Comment avait-elle pu véritablement envisager de tuer son binôme ? De mourir aussi bêtement ? N'avait-elle pas promis à Thomas de se battre ? Soudainement, un énorme poids sembla s'abattre sur ses épaules et elle relâcha la prise qu'elle avait sur Callum, s'écarta de quelques pas. Elle l'entendit vaguement s'excuser, reconnaître qu'il avait agi stupidement - si la brune était bien d'accord avec lui, elle n'eut même pas envie d'en faire la remarque. Puis, il demanda à ce qu'ils partent d'ici, évoquant les oiseaux. Amelia hocha vaguement la tête en réponse mais s'avéra incapable de bouger. Elle se sentait incroyablement fatiguée, à bout de forces, à présent que sa colère l'avait quittée. Au lieu de le suivre ou, mieux, d'ouvrir la marche, elle s'assit contre un arbre. Hors de question toutefois d'avouer à voix haute qu'elle se sentait mal. Tout en regardant la lame de son couteau, évitant ainsi le regard du jeune homme, elle expliqua sur un ton détaché :

"Mauvaise idée... La Corne a été fermée aujourd'hui, tous les Carrières seront sur les nerfs mais il y a peu de chance qu'ils viennent ici. Cet endroit fout trop les jetons, et quasiment aucun tribut ne s'y est dirigé après le Bain de Sang. On est mieux là, pour l'instant." Dans quelques heures, et si l'arène continuait à évoluer, la situation aurait certainement changé. D'ici là, ils pouvaient bien supporter le chant de quelques piafs. Et puis, il y avait aussi ce détail dont elle se rappela seulement : "Aurelianne doit aussi nous retrouver avec Nathaniel avant la tombée du jour." Elle leva les yeux vers Callum, le défiant du regard de trouver quoique ce soit à dire sur cette alliance. Elle n'était pas enchantée à l'idée de passer son temps si proche d'un autre binôme mais c'était la meilleure solution pour s'en sortir. Pour l'instant, du moins.