⊰ color my life with the chaos of trouble

Un goût cuivré, une odeur entêtante. Le brouillard était des plus épais et pourtant, sa vision était étonnement. Il distinguait les volutes de fumée et les cris alentours. La chevelure blonde tachée de sang lui chatouillait l'oreille et des larmes coulaient le long de ses joues. Des larmes salées, piquantes, au point qu'il eu l'impression qu'elles lui brulaient la peau, creusant des cillons sur celle-ci. Ses dents étaient émoussées et il s'éloigna avec un grognement inhumain avant d'entourer de ses doigts tremblant le coup gracile de la fille qui était en train de tourner de l'oeil, son regard bleu devenant de plus en plus trouble. Elle était secouée de tremblement et sa tête bascula en arrière. Il ne la lâchait pas, serrant son cou de toutes ses forces. Dans l'obscurité pesante, il la vit virer au bleu et alors qu'elle semblait avoir abandonné, quittée par ses forces, elle releva la tête avec une force si surprenante qu'il la lâcha, se léchant la lèvre avec une expression chagrinée. Elle entrouvrit la bouche et se ravisa, lui adressant à la place un sourire carnassier. Saleté de mutation génétique. Siffla-t'elle comme un serpent. Elle était si proche et son visage était couvert d'une pellicule le sang. Son haleine se mélangeait à celle du garçon et il n'eut pas le réflexe de se dégager lorsqu'elle se jeta sur lui. Aaaah beugla Penrose en se redressant son lit, effrayant sa soeur cadette qui fit un bond en arrière. Il respirait bruyamment et il avait le sentiment détestable d'être mouillé. Baissant les yeux sur les draps de son lit, il constata non pas qu'il s'était oublié comme un enfant en pleine nuit, mais plutôt qu'il était trempé de sueur. Penrose tourna la tête vers sa petite soeur. Elle lui ressemblait et elle ressemblait encore plus à leur mère. Elle semblait si petite, si fragile. Il savait pertinemment que le regard de sa soeur sur lui avait changé depuis les jeux. Elle avait vu des choses que personne n'aurait dut voir et tout naturellement, elle était effrayée. J'ai fait un cauchemar expliqua Penrose, trouvant nécessaire de se justifier quand bien même ce genre de réveils affolés était devenu monnaie courante pour lui. Elle acquiesça et il la couva du regard, désireux de trouver les mots pour la rassurer, bien qu'il ne parvenait même pas à se rassurer lui-même. On t'attend pour les cadeaux et comme tu dors depuis longtemps, je suis venue pour te réveiller balbutia-t'elle en passant une main distraire dans sa chevelure brune humide. Penrose fixa sa cadette, un air d'incompréhension affiché sur son visage. Puis, cela fit tilt. Joyeux anniversaire dit-il avec précipitation. Sa soeur le fixa durant quelques secondes avant de sortir de la pièce. A peine eut-elle passée le pas de la porte que Penrose se laissa tomber sur son lit trempé et se couvrit les yeux avec ses deux mains, replongeant à nouveau dans ses souvenirs de l'arène, dégoûté de ne même pas être en mesure de savourer ses retrouvailles avec un bon lit douillet après son séjour forcé en hôpital psychiatrique.

Ca ne ressemble pas à grand chose. Répliqua la jeune fille de quinze ans. Penrose fronça les sourcils en relevant la tête. Elle était d'humeur critique celle-là, mais il ne se sentait pas capable de la remettre un peu à sa place sur ce point : elle filait tout droit à l'abattoir. Ils se trouvaient dans le train qui les emmenait au capitole, comme chaque année en cette période en ce qui concernait Penrose. Tu t'y connais en art ? Demanda-t'il en refermant son calepin, masquant son croquis. Il arqua un sourcil en dévisageant la brunette. Elle secoua la tête en entortillant une mèche frissonnante autour de son pouce. Elle n'arrêtait pas de se ronger les ongles et entre ce tic trahissant ses appréhensions et sa manie de jouer avec ses cheveux, elle rappelait beaucoup à Penrose sa petite soeur, restée au sein de leur district. Alors c'est normal que tu ne comprennes pas. Répondit Penrose en s'efforçant de sourire quand bien même la situation n'était amusante pour personne. Elle haussa les épaules et tira une chaise ou elle s'installa. Elle porta à nouveau sa main à sa bouche et Penrose se mordilla la lèvre. On arrive bientôt, ça ne devrait plus être très long. Elle approuva d'un signe de tête en lui adressant un pale sourire, mais elle était trop proche pour feindre d'être forte et il la vit trembler. Cette vue lui serra le coeur quand bien même il n'endossait pas son rôle de mentor pour la première fois. Etant le seul gagnant au sein du district huit, il rempilait ainsi tous les ans, s'efforçant de partager son expérience alors qu'il aurait volontiers effacé tous ses souvenirs de l'arène s'il en avait été capable. Durant toute la durée du jeu, il espérait, mais jamais il n'avait vu ressortir gagnant l'un de ses tributs. Ils mourraient toujours, tristement, plus ou moins rapidement. La jeune fille assise à côté de lui lui rappelait la tribu du huit de son édition. La douceur dans ses yeux, avec une petite lueur de défi. Penrose s'efforça de se détacher du souvenir de la mort de sa partenaire dans les jeux, sans succès bien sûr. Cette image horrible était gravée dans sa mémoire, toujours là avec lui, quoi qu'il dise, quoi qu'il fasse. Il se consolait en essayant de relativiser : elle n'entendait pas, le cri de douleur qui s'est échappé de la gorge de Penrose ne lui est pas parvenu, pas plus que les coups de canons et les acclamations de victoire des tributs de carrières, ni les grognements des mutations génétiques qui lui avaient ôté la vie. Tout s'était déroulé dans le silence et Penrose demeurait sûr qu'il s'était agit d'un luxe. Dans son malheur et dans la douleur, elle avait eu droit au silence. La demoiselle en face de lui n'allait pas avoir cette chance. Tu peux y arriver. Les mots se voulaient rassurants, mais tristement, Penrose ne se défaisait pas de l'idée qu'ils étaient surement mensongers. (...) Ce ne serait pas encore pour cette année. Penrose passa une main rageuse dans ses cheveux bouclés, se détournant de la vue de son dernier tribut en jeu décédé, quelques minutes seulement après le début des jeux. Le bain de sang était une épreuve terrible et les morts s'accumulaient au cours des premières minutes du jeu. Une dizaine de minutes et sept vies fauchées, dont deux, deux vies appartenant à des enfants du district huit. Penrose l'intéressé poussa un soupire en se tournant vers la provenance de la voix qui venait de l'interpeller. Il se retrouva en face d'Onasia, une autre gagnante, sur place en tant que mentor, tout comme lui. Bonjour dit-il, un peu sèchement, sans être en mesure de maîtriser la tension et la fatigue dans sa voix. Il était fatigué par sa vie, par ses souvenirs, par les jeux. Il était fatigué de tout. Elle l'épuisait, elle aussi. Il éprouvait pourtant d'ordinaire un sentiment d'apaisement et de joie en sa présence, mais il était las de la sentir loin de lui quand il s'efforçait d'approcher d'elle. N'était-il pas suffisamment clair qu'elle lui plaisait ? Enfin, ça ne devai pas être réciproque et il n'était pas d'humeur à feindre d'avoir une conversation banale sur la vie et la mort. Il faut que j'y ailles. Ajouta-t'il avant de s'éloigner.