luca (+) people think i'm shy, i just don't give a fuck about what they say.

Parfois, je me demande bien ce que je serais devenu si ma mère était normale, si ma soeur serait moins chiante et si je bosserais moins pour me garder en vie.  Serais-je plus heureux?  Parlerais-je plus?  Sincèrement, j'essaie d'y penser le moins possible.  Au District 6, tout le monde croit que nous sommes en santé, que nous sommes beaux... HA! HA! HA!  Bande de cons, si vous allez dans les quartiers moins photographiés ou filmés par le Capitole, vous verrez bien que les gens se marchent dessus et se partagent les bactéries.  Je suis né dans une atmosphère bien étrange.  Là où les gens commencent à être irritables, fatigués et plus en plus paranoïaques.  Les gens en ont marre, on le voit tout de suite.  Les trafics de drogues médicinales n'est pas rare dans mon coin.  C'est facile d'entrer dans un hôpital ou dans une usine et de piquer de la morphine ou encore de la métamphétamine, beaucoup plus qu'on le croit.  Il n'est donc pas rare de croiser des personnes carrément dopées jusqu'à l'os.  Et dans toute cette grande vague de personne, il y a cette conne qui se tient à une cheminée pour avoir le vent dans la figure.  Ça, c'est ma soeur.  Alors que tout le monde se pique pour se voiler de la merde qui se passe devant leurs yeux, il y a ma soeur qui m'exaspère.  Du haut de ses dix-sept ans, elle est en pleine phase de rébellion et de ce je-m'en-foutisme si peu original.  Parfois, je l'imagine très bien perdre pied et dégringolé en bas de la cheminée... bien fait pour toi.  Bref, entre tout ce peuple tous plus différents les uns des autres, il y a nous.  Le muet quasi retardé qui préfère ne pas parlé pour ne pas causer un "what the fuck" unanime par toute la communauté du District 6, la rebelle suspendue à sa cheminée et la prostituée dealeuse dans ses temps libres.  Sympa le portrait familial, non?

Nous avons grandi ainsi, un père inconnu, ou tout simplement que nous ne voulons pas regarder dans toutes les conquêtes de notre mère pour essayer de trouver le parternel potentiel.  Une mère qui se prostitue et qui était auparavant une rebelle endurcie qui aimait foutre la merde (c'est de la vient cette mauvaise habitude de Ryscea je crois) et qui vend aussi de la morphine... je vous l'ai dis, même une prostituée arrive à se procurer cette merde, c'est facile comme tout!  Et nous étions dans cette masse, des gens que l'on retrouve mort sur le coin des rues.  Mais ça, le Capitole le cache et tous les "touristes" qui viennent nous visiter sont toujours bouche-bée.  Nous n'avons jamais été riches, avoir un peu trop d'argent, je ne sais pas ce que c'est.  Le District bouffait toutes nos économies, toute notre nourriture et toute notre énergie.  Je me rappelle toutes ces fois où nous avons dû aller demander asile au foyer dans ces temps trop froids où nous tentions tant bien que mal d'isoler les parois froides de la maison.  Je me rappelle même le contact de l'air froid contre ma peau... et mes tentatives de me rapprocher de Rys pour partager un peu de chaleur.  Jeune et con, c'est bien moi ça!

En grandissant, j'ai bien vite réalisé qu'il fallait que je fasse quelque chose.  Essayer de me blottir contre ma soeur ou de changer ma mère, c'était des choses impossibles et il fallait très bien que je me rende à l'évidence.  Je n'ai que quatorze ans, je suis déjà endurci comme un boeuf, et je ne compte plus le nombre de raclées que ma mère nous a donné.  Je ne compte plus le nombre de fois où je l'entendais gémir dans la pièce à côté, soit à cause d'un viol, soit parce qu'elle prenait plaisir à sa profession.  Beurk.  Je savais qu'il fallait que je bouge, que je fasse quelque chose de cette vie que l'on m'avait donné.  Un jour, j'ai tout bonnement décidé de me chercher un boulot, mais essayez de trouver quelque chose de potable à quatorze ans alors que le monde entier vous croit imbécile.  À force de se faire taper dessus à cause de toutes les questions que l'on a sur la vie, sur son fonctionnement et le fonctionnement de l'être aussi idiot que nous sommes... J'ai vite appris à me fermer la gueule.  Trouver un job était si difficile et avec la réputation que j'avais, un seul m'a ouvert les bras: lessiveur.  Grosse merde me direz-vous, je travaille des heures pas possible pour un travail merdique et j'obtiens un mince salaire pour lequel mon cerveau me crit à quel point je suis imbécile.

C'est mieux que rien, je me contente de ce que j'ai, j'essaie de grandir.  Mais je sens ce sentiment, il est pénible, il est puissant, il est destructeur, le stress.  Je me réveille plusieurs matins, les mains tremblantes, les sueurs froides coulant dans mon cou et je me dis que ce n'est pas possible de vivre ainsi.  Je ne sais plus quoi faire, quoi dire ou comment réagir.  Je remarque que tout le monde commence à devenir de plus en plus agressif au District.  Le peuple devient une bombe à retardement, les Hunger Games approchent, c'est comme si... le temps ralentissait et la communauté le remarque, le sent, le vit.  Je n'ai peut-être que quatorze ans, mais je sais une seule chose : plus on parle dans la situation où nous sommes, plus ça irrite les gens et plus on met notre vie en danger.  Alors j'ai une seule chose qui me vient en tête, et c'est principalement la raison pour laquelle je ne parle pas beaucoup, voir quasiment jamais.

La parole ne vaut plus rien aujourd'hui, elle est même destructrice.