milo ♣ il neige et l’ombre immense se défait, parmi les branches

Je suis là, seul. J'attends l'aube du crépuscule, le crépuscule de l'aube. En d'autres mots, le début de la fin, la fin du début. La main dans les cheveux, le regard distrait. Je me tiens debout. Le mur de briques m'aide à me soutenir. Car je suis faible, très faible même. Je pense à la mort, au suicide, au désespoir. Je me coupe avec la lame du couteau de cuisine de temps en temps. Ça me fais mal mais j'aime ça. La douleur, la tristesse, la colère. Les seules choses que j'ai connues depuis ma naissance. Ce sont mes amis. Je prends bien soin de ne pas décevoir l'une d'entre elles car elles pourraient mal le prendre. Alors, je tournerai petit à petit vers la joie. J'aimerais bien mais malheureusement, mes parents m'en empêcherait. Ils aiment me voir souffrir. Ils veulent me voir souffrir. Et comme par hasard, j'ai pas d'amis. Pas de frères ni de sœurs. Je peux parler à personne. Bref, ici c'est la merde. Y'a moi qui veux se tuer et y'a mes parents qui vivent grâce à la drogue et à l'alcool. Moi j'suis là comme un idiot. J'me tiens debout à observer les gens dans la rue. Tout le monde à l'air déprimé. Y'a de temps en temps des gens joyeux mais c'est vraiment rare. District 9... On vit vraiment dans un endroit comme ça ? En plus le nom c'est pas original... Au pire "Suicide Town" ou "Attention si tu viens ici il y a des gens drogués qui veulent se tuer". Au moins c'est significatif de la réalité... Des fois, je me demande même si les céréales qu'on produit sont remplies d’ecstasy ou de cocaïne. Parfois dans la rue j'vois des filles que j'ai baisé. Bon. C'était pas avec douceur, tendresse et amour mais je connais pas ça moi... J'ai quand même 16 ans. On me dit souvent aussi que je suis fou. J'sais pas pourquoi... C'est peut-être cette plante étrange dans ma cour que je fume quand je suis déprimé. C'est à dire tout le temps. J'ai aucune idée de l'origine de cette feuille. La seule chose que je sais c'est qu'avec ça, je vois des arc en ciels partout. Au moins c'est naturel... Sinon j'vois pas ce qui cloche chez moi. J'suis comme tout le monde non ? À moins que je m'imagine tout ça.

Je me redresse puis je commence à marcher vers ma maison. Lentement, je fais le vide dans ma tête. Je n'entends plus que le bruit de mes pas sur le sol sec et chaud. Je distingue les vagues traits de ma maison au loin. Oui oui. Le District 9 est très grand. Je l'ai jamais tout exploré. J'suis jamais allé dans le quartier riche. Parfois, je m'imagine comment c'est là bas. Malheureusement, je sais pas du tout comment c'est aménagé. Je m'approche de plus en plus de la maison. Je commence à entendre mes parents s'engueuler. De plus en plus fort à mesure que j'approche. Personne se préoccupe d'eux. Tout le monde ici ne pense qu'a sa survie. Je traverse enfin le cadre de porte. Dès que je rentre dans la maison, ma mère me donne une claque.

- T'étais où bordel ! Ça fait des heures que tu es partit sans nous avertir ! Si tu serais mort ça aurait pas été une grosse perte de toute façon.

Moi j'suis là, figé comme un con. J'sais pas quoi dire. Je vais dans ma chambre. Je claque la porte et je sors mon couteau. Je commence alors à m'ouvrir les veines une par une. J'me sens bien. Toutes mes souffrances s'échappent de mon corps. J'me dit que j'aimerais bien aller un jour aux Jeux de la Faim. J'ai aucune chance de survie de toute façon. J'pense que je viens de comprendre pourquoi on me prends pour un cinglé. Car je suis cinglé.

( Le délire c'est la théorie d'un seul, tandis que la théorie est le délire de plusieurs. ) - François Roustanf