don't bark if you can't bite.

Elle aiguise son couteau avec attention, se concentrant calmement sur la lame. Elle la nettoie, souffle légèrement dessus pour retirer les petites poussières restées sur la lame et relève les yeux. La môme plisse les yeux, fixe la cible à une dizaines de mètres d'elle et mime la trajectoire que son couteau effectuera. Finalement, elle saisit l'arme de sa main gauche, fait quelques mouvements, et la lance. Cette dernière vient se planter en plein centre de la cible. Sive retient un sourire satisfait, contenant sa joie au fond d'elle-même. Parfois elle s'imagine ce qu'elle aurait fait, dans l'arène, à la place de son frère. Elle se demande si elle se serait ôtée la vie pour lui offrir la victoire. Elle se demande si elle aurait eu les tripes de le faire. Elle se demande si l'instinct de survie qui sommeil en elle ne lui aurait pas gueulé de courir vers sa sœur pour lui ôter son dernier souffle de vie. Et puis elle sort subitement de ses sombres pensées et se satisfait à la pensée qu'une telle chose ne pourra jamais lui arriver. Sive admire Heidi, même si elle ne le lui a jamais dit, même si elle éprouve toujours un arrière-goût d'amertume vis-à-vis de ce qui s'est passé dans l'arène cinq ans plus tôt. Au fond d'elle, elle n'éprouve que du respect envers elle. Du respect parce qu'après tout ce qu'elle a vécu, elle tient toujours debout, elle feint toujours des sourires parfois peu convaincants. Sive se dit qu'elle le fait probablement pour Rufus, parce qu'il n'aurait pas voulu voir sa sœur se crever le cœur, se gâcher la vie, parce que sa mort aurait été veine. Son sacrifice. Quelques fois, le cœur de Sive se serre atrocement dans sa poitrine, elle est parfois presque jalouse de la relation que ses aînés avaient, quand elle regarde en arrière elle a cette amère impression d'avoir toujours été derrière-eux, d'avoir partagé moins de choses. Et puis elle balaye ces pensées, relève la tête et lance une nouvelle lame. Elle manque sa cible, comme à chaque fois qu'elle pense à ce genre de choses. Ce genre de choses qui la déstabilisent. La famille, c'est exactement ce genre de trucs dont elle ne parlera jamais. Parce que ça lui fait trop mal, parce que c'est trop personnel et surtout parce qu'elle tient à cette image de fille au cœur de pierre qu'on lui a trop vite donné. Parce que Sive sait aimer. Et quand Sive aime, c'est de tout son cœur, de toutes ses forces, quand Sive aime, c'est pas à moitié, quand elle aime c'est pour toujours, Sive elle n'arrête jamais d'aimer les gens qui ont compté, peut importe les années qui passent, y a toujours ce feu au fond d'elle qui se ravive quand elle croise des gens qui, un jour, ont tout représenté. Alors ça veut pas dire qu'elle se tuerait pour ceux qu'elle aime, parce que ça, au fond, personne ne le sait vraiment, personne ne sait ce qu'il ferait face à un tel choix, on ne peut pas avoir la prétention de dire qu'on irait se flinguer pour un autre, c'est la nature Humaine qui veut ça. Mais Sive ne montre que cette autre facette d'elle-même, celle qui n'avance que par la rage de vaincre, la rage de tout gagner, le désir ne serait-ce que d'effleurer de ses doigts la gloire. Sive ne montre aux gens que ce qui est en mesure de les repousser. Parce que Sive, ce qui la fait flipper encore plus que la mort, c'est les attaches. La peur de perdre quelqu'un. Alors Sive elle s'en va avant qu'on ai pu avoir la chance de s'attacher à elle, avant qu'elle-même n'en ai eu l'occasion. C'est tellement plus simple, et ça fait tellement moins mal.